Un directeur (4000 salariés) me demande de rencontrer son adjoint de direction.
Je connaissais un peu cet adjoint, pour l’avoir eu en formation : C’était un vrai professionnel, fiable, et d’une bienveillance humaine dont on a plaisir à croiser le chemin. Une belle personne.
Cet adjoint est devenu insaisissable. Agacé, autoritaire, impatient, coléreux, avec en plus des failles dans son professionnalisme : Ses dossiers sont bâclés, avec des erreurs, des imprécisions : Plus personne ne le reconnaît. Ses salariés s’en plaignent.
Le directeur me demande de le rencontrer pour faire un point, essayer de comprendre, de le « remettre sur les rails ». Sinon, le licenciement se profile.
Après deux rencontres, l’adjoint m’avoue vivre un moment difficile et douloureux. Depuis trois mois, sa femme se bat contre un cancer.
Je me retrouve avec une réalité personnelle ignorée de tous dans l’entreprise.
Dans un premier temps, il refuse que j’en parle à son directeur. « C’est un problème personnel, c’est ma souffrance, ça m’appartient et qu’à moi ».
Suite à une troisième rencontre, il accepte in fine que j’en parle à son directeur, et à lui seul. La réponse ne peut venir que de son supérieur.
J’en informe confidentiellement son directeur, qui est effondré, paniqué.
Puis ce dernier prend le dessus, pour prendre quelques décisions :
– Lui retirer les dossiers les plus lourds pour les prendre en charge lui-même ou en confier certains à d’autres collaborateurs.
– Lui donner carte blanche pour gérer son temps. « Il vient quand il veut, quand il peut, lui permettre d’aller aux RV médicaux, de rester avec sa femme, de profiter des enfants, etc. ». Et ce sans limitation de durée ni aucune autre contrainte.
Il est des entreprises extra-ordinaires, qui ont dans leurs gènes cette sensibilité humaine.
Les dysfonctionnements des salariés sont des signaux qu’il faut interpréter : Manque de connaissances et de formations, problèmes d’organisations, soucis de fournisseurs, …, mais aussi « drames » personnels plus complexes à identifier car dans la sphère personnelle. Les enfants qui quittent le nid familial en remplissant la présence par le vide, les soucis fréquents des adolescents, les mésententes conjugales, les soucis bancaires, les
problèmes d’amour ou de divorce, les parents âgés à suivre et accompagner, …
Nous ne pouvons pas être « bien » au travail et « mal » dans nos vies.
Question d’écoute, d’observation, de sensibilité, de vigilance, d’empathie.
Soyons des entreprises capables de repérer et de résoudre les difficultés
personnelles !
Mettons l’humain au centre de l’entreprise.